Héritage / Miguel Bonnefoy

Cette saga familiale se déroule entre la France et le Chili, sur plusieurs générations. On suit Lonsonier laissant derrière lui sa vigne malade dans le Jura pour tenter sa chance en Amérique du Sud. Il va s’installer à Santiago au Chili, se marier, développer une entreprise florissante. Dans un élan patriotique, son fils Lazare partira pour la France et se battra dans les tranchées lors de la Première guerre mondiale. Et ainsi de suite, on suit la descendance de Lonsonier au fil de l’Histoire, notamment la Seconde guerre mondiale, la dictature de Pinochet. Chacun d’eux sera en proie à un terrible dilemme qui le poursuivra toute sa vie. Et puis il y a aussi une sorte de légende qui se transmet de génération en génération : « Quand tu iras en France, tu rencontreras Michel René. Il te racontera tout. »

Miguel Bonnefoy peint cette grande fresque romanesque tel un conteur. Les aventures se multiplient ne laissant pas de répit à ses personnages.

Il brosse également de magnifiques portraits de femmes. La jeune Margot voudra devenir aviatrice et réussira coûte que coûte. Sa mère, Thérèse, est passionnée d’oiseaux et en remplira sa maison avant de les installer dans une volière. C’est haut en couleurs. Ce livre met les sens en éveil, je me suis imaginée au milieu de cette fabrique d’hosties avec ses odeurs de farine grillée. Les histoires s’imbriquent les unes dans les autres. Il y a aussi un côté surnaturel et de magie dans ce roman que je vous laisse découvrir.

J’ai assisté à l’interview de Miguel Bonnefoy par Karine Papillaud dans le cadre des rencontres « Un endroit où aller ». Il est passionnant et passionné par ses personnages. Apparemment certains de ses personnages apparaissent déjà dans ses précédents romans et prennent de l’ampleur dans celui-ci. Il construit une œuvre romanesque très intéressante. En plus, c’est un fan de Gabriel Garcia Marquez, bref je ne peux qu’aimer cet écrivain ! Je vais donc lire ses autres romans et tenter de trouver les différentes pièces du puzzle parsemées par Miguel Bonnefoy.

Note : 5 sur 5.

Saturne / Sarah Chiche

Gros coup de cœur pour ce roman fort et envoûtant, je n’ai pas pu le lâcher bien que le sujet ne soit pas joyeux. Roman autobiographique ou récit intime ? Peu m’importe, ce livre est bouleversant.

L’histoire de cette famille débute en 1950 en Algérie, quand elle s’exile en France. Le grand-père est médecin, riche. En arrivant en France, il va ouvrir sa clinique privée et poursuivre son ascension sociale. Ses fils n’ont d’autre choix que de faire médecine et de réussir. Pour Armand, l’aîné, tout sera facile, mais pour Harry, plus jeune d’un an, tout sera difficile. On assiste à une concurrence entre les deux frères, lequel triomphera de l’autre ? L’aîné est le préféré et il est brillant. Le cadet est considéré comme un rêveur et s’avère médiocre dans ses études.

Le roman s’ouvre sur une scène beaucoup plus récente, en 1977. Nous sommes dans une chambre d’hôpital et le père de la narratrice est en train de mourir d’une leucémie. Harry est entouré de sa famille. Il meurt à l’âge de 34 ans laissant un grand vide derrière lui, notamment pour sa fille de 15 mois.

Elle raconte la mort de son père puis retrace la rencontre de ses parents. Elle ne nous épargne rien : leurs ébats, la haine de ses grands-parents contre sa mère, la rivalité des deux frères. Elle narre comment sa famille a détruit son père.

Sa mère, Eve, est fantasque. Elle est très belle, pose comme mannequin mais elle est aussi mythomane, insaisissable. C’est l’amour fou entre Harry et Eve.

Imaginez comment cette enfant a grandi, écartelée entre le souvenir de son père et la haine de la famille de son père pour sa mère. Comment se construire sans ce père mais aussi sans la famille de son père qui rejette sa mère ?

Une fois majeure, elle va prendre du recul par rapport à sa mère et se retrouvera seule. Quand elle apprend la mort de sa grand-mère avec qui elle est fâchée, elle va tout laisser tomber. Cet événement va agir comme un révélateur et la plonger dans une profonde dépression.

L’écriture va alors être un moyen pour elle de renaître, dans le livre comme dans la vraie vie. Un drame familial qui va peser sur la ou les génération(s) suivante(s). Sarah Chiche est psychanalyste, on sent l’influence de son métier dans son récit.

Tout est dit en peu de mots. Il y a une tension tout le long du roman, impossible de le lâcher. L’écriture est belle et fluide, faite de phrases courtes. Après la lecture de « Saturne », j’ai très envie de lire son précédent roman, les « Enténébrés », aussi bien pour retrouver cette magnifique écriture que pour avoir encore quelques clés de l’univers de Sarah Chiche.

Note : 5 sur 5.

L’invité du miroir / Atiq Rahimi

Un roman qui sort de l’ordinaire à différents égards. D’abord son format est à l’italienne, ensuite il ne s’agit pas vraiment d’un roman, plutôt de deux contes insérés dans un récit et illustrés de dessins et croquis de l’auteur.

Un livre atypique sur un sujet difficile, l’horreur du génocide au Rwanda en 1994.

Il est donc composé de deux contes rwandais, « Le chagrin de la petite chèvre » et « La genèse du lac Kivu ». A la fin lexique de mots en kinyarwanda permet de se plonger dans cette langue pour mieux comprendre la culture de ce pays.

Atiq Rahimi s’intéresse à la poétique et la rhétorique des langues. Il a quitté l’Afghanistan en 1984 pour fuir la guerre. Arrivé en France en tant que réfugié, il demande l’asile et reprend des études. Son rapport à la langue et à la littérature est très fort. Dans ce livre ses mots sonnent comme une poésie pour dire l’innommable. D’ailleurs vous pouvez retrouver sur France Culture un podcast dans les « Masterclasses » intitulé « Atiq Rahimi : Toute notre littérature est fondée sur la poésie, car c’est grâce à elle qu’on échappe à toute forme de censure ».

Il a reçu le prix Goncourt en 2008 pour son roman « Syngué sabour : pierre de patience ». Il est écrivain mais aussi cinéaste et photographe. Dans tous ses actes et paroles, il milite en faveur de la paix et de la tolérance.

Note : 5 sur 5.

« Igisekeramwanzi » : l’enfant qui sourit même à l’ennemi, pour désigner l’innocence.

A l’occasion d’un tournage :

« Ici,

je filme

l’Innommable

dans le rêve e le cauchemar des anges noirs aux ailes de cygne. »

Conversation avec un homme :

« Il faut nommer l’horreur,

nommer pour l’identifier,

l’identifier pour ne pas l’oublier,

ne pas l’oublier pour ne pas la répéter

ne pas la revivre… »

[…]

« Ici, le silence

n’est pas pour prier

mais pour chercher

à nommer les maux innommables. »

[…]

« Les survivants d’un génocide n’ont pas d’ombre.

Ils sont ombres.

Ombres errantes de leurs morts. »

[…]

« Un million

Torturés, coupés, découpés…

D’autres disent huit cent mille.

D’autres moins…

Plus…

… moins.

Qu’importe !

Tuer un seul être,

un seul,

au nom de sa naissance,

c’est un génocide.

Un seul. »

Du côté des indiens / Isabelle Carré

Isabelle Carré dans ce second roman nous offre plusieurs histoires, celles de Ziad, un petit garçon de 10 ans, ses parents Bertrand et Anne, ainsi que leur voisine du 5ème étage Muriel.

Au fur et à mesure que l’on avance dans le roman, les pièces du puzzle se mettent en place et on entre dans l’intimité, les secrets de chacun.

Ziad attend chaque soir que son père rentre, alors que l’ascenseur ne s’arrête pas à leur étage (2ème) mais à celui de Muriel, qu’il va retrouver.

Muriel vit seule. Elle a 34 ans, c’est une belle femme mais écorchée par un premier rôle au cinéma où elle n’a pas réussi à dire « non » au baiser du réalisateur et tout ce qui suivra. Elle va arrêter sa carrière d’actrice et devenir scripte.

Bertrand vit avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. A tout moment il peut avoir une rupture d’anévrisme. C’est pourquoi quand il rencontre Muriel, il décide de vivre cette passion avec elle. Il se sent vivant et heureux avec cette jeune femme. Ziad va mettre un terme à leur relation en allant voir Muriel.

Anne, la mère de Ziad, c’est une autre histoire que je vous laisse découvrir, mais sachez qu’elle boit de plus en plus. En tout cas ce personnage détonne totalement par rapport aux autres.

On plonge dans l’ambiance d’un plateau de tournage avec Muriel. Il y a de nombreuses références à des films, des répliques. Comme Ziad, on s’émerveille d’assister à cette journée de tournage.

Les personnages sont tourmentés, se posent beaucoup de questions car sont à des moments charnières de leur vie. Ziad sort de l’enfance et agit avec beaucoup de maturité, par rapport à ses parents qui s’enfoncent chacun dans leurs problèmes. Il y a une belle complicité qui naît entre Ziad et Muriel.

J’ai plus accroché au second roman d’Isabelle Carré qu’à son premier. L’écriture est fluide. J’ai passé un bon moment de lecture en compagnie de ses personnages. Mais l’histoire entre Ziad et Muriel aurait pu suffire à faire un roman. Peut-être était-ce un peu trop ambitieux de vouloir développer les 4 personnages. Un roman tout en sensibilité, à l’image de son auteure.

Au fur et à mesure que l’on avance dans le roman, les pièces du puzzle se mettent en place et on entre dans l’intimité, les secrets de chacun.

Ziad attend chaque soir que son père rentre, alors que l’ascenseur ne s’arrête pas à leur étage (2ème) mais à celui de Muriel, qu’il va retrouver.

Muriel vit seule. Elle a 34 ans, c’est une belle femme mais écorchée par un premier rôle au cinéma où elle n’a pas réussi à dire « non » au baiser du réalisateur et tout ce qui suivra. Elle va arrêter sa carrière d’actrice et devenir scripte.

Bertrand vit avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. A tout moment il peut avoir une rupture d’anévrisme. C’est pourquoi quand il rencontre Muriel, il décide de vivre cette passion avec elle. Il se sent vivant et heureux avec cette jeune femme. Ziad va mettre un terme à leur relation en allant voir Muriel.

Anne, la mère de Ziad, c’est une autre histoire que je vous laisse découvrir, mais sachez qu’elle boit de plus en plus. En tout cas ce personnage détonne totalement par rapport aux autres.

On plonge dans l’ambiance d’un plateau de tournage avec Muriel. Il y a de nombreuses références à des films, des répliques. Comme Ziad, on s’émerveille d’assister à cette journée de tournage.

Les personnages sont tourmentés, se posent beaucoup de questions car sont à des moments charnières de leur vie. Ziad sort de l’enfance et agit avec beaucoup de maturité, par rapport à ses parents qui s’enfoncent chacun dans leurs problèmes. Il y a une belle complicité qui naît entre Ziad et Muriel.

J’ai plus accroché au second roman d’Isabelle Carré qu’à son premier. L’écriture est fluide. J’ai passé un bon moment de lecture en compagnie de ses personnages. Mais l’histoire entre Ziad et Muriel aurait pu suffire à faire un roman. Peut-être était-ce un peu trop ambitieux de vouloir développer les 4 personnages. Un roman tout en sensibilité, à l’image de son auteure.

Note : 4.5 sur 5.

Liv Maria / Julia Kerninon

Liv Maria Christensen grandit sur une île bretonne avec sa famille. Ses parents sont un couple atypique : un père marin norvégien et une mère tenancière de café bretonne. Elle pousse comme une plante sauvage, en liberté.

A 17 ans, suite à un événement, ses parents l’envoi à Berlin chez sa tante. Elle suit des cours d’été et tombe amoureuse de son professeur, Fergus, un Irlandais plus âgé. Après l’été, quand il retourne chez lui, il lui donne une fausse adresse pour lui écrire.

Quand elle apprend la mort de ses parents dans un accident de voiture et décide de partir en Amérique du sud. Elle fuit. Toute sa vie, elle fuira. Elle vivra mille vies.

Elle finit par se poser au Chili et rencontre un homme marié qui deviendra son patron mais aussi son amant, le señor Carrar. Elle a une vie dépravée qui la mène à une chute au sens propre et au sens figuré. Elle sera paralysée quelques semaines. Elle se remet petit à petit mais boîte encore. « Elle était riche et blessée, elle avait vingt-neuf ans ».

Jusqu’au jour où elle rencontre dans une librairie un homme, Flynn, un Irlandais. C’est le coup de foudre. Ils se marient rapidement et décident de s’installer en Irlande, près de sa famille à lui. Ils vont avoir deux enfants et Liv Maria ouvrira une librairie. Tout paraît aller pour le mieux.

Mais en Irlande, le secret qui la ronge refait surface et ne la quitte plus, jusqu’à la tourmenter et l’obliger à prendre une décision radicale. Liv Maria restera toujours insaisissable pour son mari. Faut-il mentir pour rester libre ?

Un magnifique portrait de femme libre, avec de multiples rebondissements, parfois invraisemblables. Je ne l’ai pas lâché, l’écriture est agréable et l’histoire prenante. Un bon moment de lecture.

Note : 4 sur 5.

La nappe blanche / Françoise Legendre

Ce roman n’est pas une nouveauté, je l’ai découvert à l’occasion du prix C’est facile de lire, organisé par des collègues. L’édition est destinée au public jeunesse mais comme beaucoup de romans jeunesse, il peut également être lu par des adultes. D’ailleurs, il m’arrive souvent de lire des romans pour ados. J’ai bien aimé la série de Marie-Aude Murail, « Sauveurs et fils » dont le 6ème tome vient de sortir et que je ne vais pas tarder à lire et chroniquer par ici ! Parmi les auteurs écrivant aussi bien pour les enfants que pour les adultes, il y a Timothée de Fombelle, Marie-Sabine Roger, Jean-Claude Mourlevat, Anne-Laure Bondoux, que des auteurs que je vous recommande bien évidemment.

« La nappe blanche » est un petit roman par sa taille (collection petite poche) et son nombre de page (45), mais possède de nombreuses qualités 🙂

Tout commence en 1910, lorsque Jeanne brode une nappe blanche en lin pour le mariage de sa petite-fille Anna et de Jean. Cette nappe va traverser l’histoire familiale et celle de la France jusqu’en 2014. On assiste à des moments de bonheur touchants mais aussi à des moments plus difficiles lors de la 1ère et 2ème guerre mondiale. Une belle leçon de transmission à travers cette histoire intergénérationnelle qui ne vous laissera pas indifférent. L’écriture est à la fois simple et poétique, les mots sonnent justes.

Si vous souhaitez d’autres idées de lecture, je vous ajoute ci-dessous la sélection du prix :

  • La plus précieuse des marchandises / Jean-Claude Grumberg (Seuil)
  • L’histoire de Sam ou l’avenir d’une émotion / Jean-Marc Parisis (Flammarion)
  • Une prière à la mer / Khaled Hosseini, illustré par Dan William (Albin Michel)
  • Histoire d’une baleine blanche / Luis Sepulveda (Métailié)
  • Petits portraits de très grandes personnes / Barbara Constantine, illustré par Cécile Gillet (Calmann-Levy)
  • L’homme qui plantait des arbres / Jean Giono (Gallimard)
  • Epices et sentiments / Vincent Engel (Weyrich édition)
  • Maman / Hélène Delforge, illustré par Quentin Gréban (Mijade)
  • Journal d’un enfant de Lune / Joris Chamblain, illustré par Anne-Lise Nalin (Kennes éditions)

C’est une sélection de livres pour des personnes ayant des difficultés de lecture ou souhaitant une lecture facile, rapide. Une démarche de plus en plus proposée dans les bibliothèques sous l’appellation « Facile à lire » pour faciliter l’accès aux livres. Ces livres répondent à certains critères : avoir moins de 200 pages, un récit simple avec peu de mots composés, une typographie sans empattement, une pagination aérée, des chapitres courts et si possible des illustrations. En plus des romans, on y trouve des bandes dessinées, des albums, des livres de photos.

Note : 5 sur 5.

Chavirer / Lola Lafon

C’est l’histoire de jeunes filles de 12-13 ans issues de classes pauvres ou moyennes, abordées par la fondation Galatée dans les années 1980, qui leur promet une bourse pour réaliser leur rêve. Pour Cléo ce sera la danse.

Cléo rencontre Cathy à son cours de danse. Cathy la prend sous son aile, l’emmène visiter des musées, lui offre des cadeaux. Cathy propose à Cléo d’appuyer son dossier auprès de la fondation. Ensuite Cléo doit passer des entretiens à Paris, sans Cathy. Elle s’y rend, déjeune en compagnie d’hommes qui lui posent des questions, s’intéressent à elle. Cléo se sent flattée, jamais on ne lui a porté autant d’attention. Elle reçoit même de l’argent pour être venue à cet entretien. Alors elle passe un second entretien mais qui va la marquer à jamais. Cathy lui annonce qu’elle n’aura pas la bourse mais qu’elle peut l’aider et devenir son assistante. Son rôle sera de repérer d’autres talents comme elle, qui aimeraient réaliser leur rêve grâce à la fondation. Un travail rémunéré bien entendu. Les parents de Cléo disent oui à tout, ne se méfient pas. Cléo devient donc recruteuse dans son collège et dans les collèges voisins et approvisionne en jeune fille des quinquagénaires.

Cléo ne se perçoit pas comme une victime, au contraire elle pense que tout est de sa faute, qu’elle n’a pas eu assez de maturité pour contenter l’homme de la fondation. Elle poursuivra son rêve sans la fondation et deviendra danseuse de revue pour l’émission « Champs Elysées » de Michel Drucker.

Cléo nous plonge dans le milieu de la danse et des paillettes mais côté coulisses. On ressent toute la douleur subit par son corps répétition après répétition.

Dans le roman, plusieurs voix s’entrecroisent pour raconter la vie de ces jeunes filles (Cléo et Betty), leurs difficultés à se (re)construire après ce traumatisme ou encore l’impossibilité d’oublier.

Quelques années plus tard, en 2019, deux jeunes femmes recherchent les victimes de la fondation Galatée. Elles souhaitent faire un documentaire. Cléo et toutes les autres filles oseront-elles affronter leur honte et leur culpabilité pour témoigner ?

Ce roman est construit d’une main de maître, difficile de le lâcher. On s’attache à ces jeunes filles et certains passages sont bouleversants. Il n’y a pas de mots crus, les scènes d’attouchement ou de viol sont suggérés. Un roman qui marquera les lecteurs, tout comme celui de Vanessa Springora, un roman essentiel.

Note : 4.5 sur 5.

Une rose seule / Muriel Barbery

Rose se rend au Japon suite au décès de son père qu’elle n’a pas connu, pour l’exécution de son testament. Elle a grandi avec sa mère et sa grand-mère en France. Sa mère ne voulait pas parler de son père. Elle l’a rencontré lors d’un voyage au Japon. La mère de Rose est morte, elle était dépressive et s’est suicidé. Rose a hérité du côté sombre et mélancolique de sa mère. Elle a 40 ans au moment où s’ouvre le roman. Son métier, botaniste, donne l’occasion de parsemer le roman de fleurs.

Elle arrive au Japon, dans la maison qui fut celle de son père et rencontre les personnes qui gravitaient autour de lui. C’était un marchand d’art riche. C’est son assistant, Paul, un belge, qui va lui servir de guide et d’interprète. Il l’emmènera chaque jour dans un autre endroit, un circuit imaginé par son père. Et il subira à chaque fois la mauvaise humeur de Rose, son aigreur. Mais Paul saura lui tenir tête et lui répondre intelligemment.

Sur une photo de son père enfant, elle voit son regard de glace et de feu. Elle a aussi cette colère qui l’habite. Moment troublant où elle réalise qu’elle a le même regard que son père.

Puis elle va découvrir le mur de photos que son père a construit année après année, en la faisant épiée. Rose est en quête d’identité. Elle ne sait pas qui elle est, ni ce qu’elle veut.

Elle va tomber amoureuse de Paul. Deux êtres tourmentés qui auront peur de leurs sentiments, d’aller vers la lumière.

Tous les personnages sont intéressants. L’auteur glisse aussi quelques traits d’humour en comparant un jardin de Kyoto à un bac de litière pour chat.

Ce roman fait appel à tous les sens. Je suis partie en voyage au Japon. J’avais l’impression de goûter la cuisine des restaurants japonais avec Rose, le thé, de sentir la sérénité des jardins zen et des temples, comme si j’y étais. Muriel Barbery a un don de pouvoir d’évocation. Ce petit livre est un pur moment de poésie. Gros coup de cœur. A peine refermé j’ai eu envie de le relire, de retrouver ces moments de grâce et d’élégance. Un petit bijou.

Note : 5 sur 5.

On fait parfois des vagues / Arnaud Dudek

La vie de Nicolas bascule après ses 10 ans lorsque ses parents lui annoncent que son père n’est pas son père biologique. Pour des raisons d’infertilité, ses parents ont eu recours à un don de sperme.

Nicolas a donc vécu sereinement et entouré d’amour jusqu’à son dixième anniversaire. Ensuite les doutes se sont immiscés. Il n’a pas de réel complicité avec son père. Ils ont des difficultés à se parler. Bref ils sont différents.

Il grandit, réussit ses études, passe des concours et devient inspecteur des impôts. Mais au bout de quelques années, il se pose beaucoup de questions sur ses origines. Il a du mal à trouver sa place. Ce qu’il aime, depuis tout petit, c’est écrire. Il a déjà proposé des manuscrits à des maisons d’édition mais sans succès. A l’âge de 30 ans, il décide de quitter son poste et de se consacrer à l’écriture.

Il va également mener des recherches pour retrouver son père biologique, ce qui n’est pas facile puisqu’un donneur reste anonyme. Malgré les difficultés administratives, il ne renoncera pas et trouvera un moyen d’en savoir plus sur cet homme.

Ce roman pose beaucoup de questions sur la paternité, la transmission et l’identité. Quel modèle Nicolas peut-il avoir sachant que son père n’est pas son « vrai » père ? Il y a de magnifiques passages sur l’enfance. J’ai eu envie de noter certaines phrases pour leur beauté ou leur trait d’humour.

C’est un roman court construit autour de chapitres courts. L’écriture est dynamique et Arnaud Dudek fait preuve d’autodérision malgré le sujet sensible. J’ai eu l’impression de partager une conversation avec Nicolas, un moment/récit intime. Les personnages sont attachants, même le père enfermé dans sa pudeur et les non-dits.

J’ai beaucoup aimé la fin, très belle, que je ne vous dévoilerai pas. Une lecture que je vous recommande.

Merci à Netgalley et aux éditions Anne Carrière pour ce beau moment de lecture.

Note : 4 sur 5.

« Apprendre son infertilité. L’admettre. Passer à autre chose. Faire le deuil de la paternité normale. Au royaume des certitudes, comment a réagi mon père ? […] Je n’ai jamais songé à aborder frontalement ces questions parce que je suis persuadé de ne rien obtenir ; si la certitude est un pays, l’esquive est un empire – et mon père maîtrise cet art aussi bien que le badminton. »

L’enfant céleste / Maud Simonnot

Ce roman raconte l’histoire de deux être fragiles, Mary et son fils Célian. Le petit garçon s’ennuie à l’école. Il est toujours dans la lune et agace son institutrice.

Mary sort d’une rupture amoureuse et traverse une dépression. Elle va décider de partir en voyage avec Célian à la poursuite de leur passion commune, l’astronome Tycho Brahe.

Ils vont s’installer dans la pension de Solveig, sur l’île suédoise de Ven. C’est sur cette île que Tycho Brahe vécut et réalisa la carte du ciel.

Leurs journées sont faites d’exploration de l’île sauvage, avec de magnifiques paysages, et de rencontres. A la pension séjourne également Des Esseintes, un professeur écrivant sur Shakespeare. L’île de Ven aurait inspiré « Hamlet » à Shakespeare. Et Mary soignera ses blessures avec Björn, un pêcheur, qui fait partie de la famille de Solveig.

Les chapitres sont courts et alternent entre la voix de l’enfant et de la mère. C’est un roman lent à l’écriture fluide, simple et douce, tout en poésie.

Maud Simonnot dépeint une magnifique relation mère-fils, tout en sensibilité. Les personnages sont attachants et leurs bonheurs sont simples. On assiste à la lente remontée à la surface de Mary qui se recherche sur cette île et se répare avec ses paysages et ses habitants.

Un magnifique roman qui ne vous laissera pas indifférent. C’est beau, à la fois lumineux et lunaire. L’occasion également d’en apprendre plus la vie de Tycho Brahe.

Merci aux autres explorateurs de la rentrée littéraire pour le partage de cette lecture.

Note : 4 sur 5.