MURmur / Caroline Deyns

Voici un roman atypique. Le début et la fin ont une mise en page particulière pour refléter la prison, le sentiment d’enfermement, de se cogner à un mur.

Il y a deux récits. D’abord celui d’une femme emprisonnée pour avoir perdu son bébé suite à une fausse couche, fait indépendant de sa volonté mais puni par la loi. Il n’y a pas de distinction pénale entre l’avortement et l’interruption de grossesse involontaire.

Puis vient le récit d’une jeune fille de 14 ans, appelée « GrandeEnfant », abusée par un garçon et enceinte. Sa mère l’aide à trouver quelqu’un pour avorter clandestinement puisque cet acte est interdit. S’ensuit un procès qui rappelle le célèbre procès de Bobigny en 1972. Il sera alors question du corps des femmes et de leur droit à en disposer, de liberté, du patriarcat, de féminisme, etc.

La lecture de ce texte a été parfois difficile et suffocante de par le sujet abordé et le malaise provoqué. L’écriture est sèche et concise pour raconter l’histoire de ces femmes. C’est extrêmement efficace.

J’ai été touchée par certains passages qui m’ont rappelé le procès et le combat de Gisèle Halimi. Mais ce n’est pas un coup de cœur pour moi. Une lecture « coup de poing » qui peut être éprouvante et qui ne sera pas pour tout le monde malgré l’importance du sujet.

Ce roman est finaliste du Prix Hors Concours 2023.

Et vous, l’avez-vous lu ?

Note : 3 sur 5.


Incipit :
« J’écris de chez les emmurées,
les parquées, les claustrées,
les assignés, les internées,
les cadenassées, les séquestrées,
les incarcérées. De chez
les captives et les recluses.
D’ici. De derrière les verrous
et après l’écrou. De la
geôle qu’est mon corps. Et de
la prison où l’on m’a enfermé. »


« J’écris d’une époque
et d’un pays délirants
qui entérinent des lois
punissant de prison
toute femme dont la
grossesse a été interrompue.
D’un endroit
où une moitié de la
population accepte
de n’être bonne qu’à
porter les générations
suivantes et sanctionnée
pour y faillir. Il n’en
a cependant pas toujours
été ainsi. Mois, je
sais. Je connais l’histoire
effacée et l’effacement
de l’histoire. »


« Je suis un terreau.

Je suis une terroriste.

Je transporte
sur moi des
explosifs
qu’on appelle
des MOTS »


« Les montagnes n’ont pas de pieds, le passé non plus. »


« Entre ses jambes, la chair qu’on gratte, racle, récure, le vide qu’on dessine, et que GrandeEnfant voudrait, si c’était possible, Docteur, qu’on lui creuse aussi à l’intérieur de la boîte crânienne, un bon gros vide, s’il vous plaît, pour la nettoyer de tous les autres restes de la vie dégueulasse. Merci. »

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