J’ai passé un agréable moment de lecture en compagnie d’Eugénie et Joséphin. Ce roman croise différents genres, à la fois conte, poésie, roman d’amour, de science-fiction, manifeste féministe, ode à la différence et méthode de développement personnel. Je sais c’est intrigant ! Mais il suffit de se laisser porter par la plume de Baptiste Beaulieu et par sa voix, car il interpelle les lecteurs autant que ses personnages. Puis un certain suspense vous maintiendra en alerte et en un rien de temps vous serez arrivés au dénouement.
Voici comment débute l’histoire : Eugénie descend du train et elle guette le taxi qu’elle a commandé pour rentrer chez elle. Le chauffeur, Joséphin est amoureux d’elle dès la première seconde où il la voit. Il n’ose pas parler. Joséphine, tout aussi troublée, le suit et parle pour deux. Joséphin en oublie sa voiture et porte la valise d’Eugénie à travers Paris en marchant, Eugénie sur ses talons. Ils découvrent qu’ils habitent l’un en face de l’autre. Joséphin a gardé sa valise sans le faire exprès. Bref ces deux-là sont un peu étourdis et n’ose pas faire le premier pas. Les chapitres alternent du point de vue de l’un ou de l’autre ou des deux.
Eugénie est inventrice. Ses inventions sont pleines de poésies. Joséphin tourne des poteries dans son atelier-appartement. Ce n’est qu’en ayant un objet qui tourne entre ses mains qu’il arrive à parler. Alors qu’Eugénie est un moulin à paroles, son problème est son corps qu’elle n’aime pas. Elle est grosse et a vécu plusieurs expériences traumatisantes. Joséphin va lui donner des cours de poterie et c’est ainsi que leur histoire va pouvoir continuer…
Mais je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher votre lecture et je vous laisse découvrir les liens avec l’actualité que l’auteur a parsemés parmi les secrets de ses personnages.
J’ai été tellement intriguée par Eugénie que je saisi son nom dans la barre de recherche d’un célèbre navigateur internet, pour voir si elle existait vraiment ! Il faut dire que ce couple a un côté « Amélie Poulain » très attachant.
C’est frais, humain, original, un roman idéal à déguster sur votre transat !
Merci à Netgalley et Fayard pour cette lecture.
« Eugénie, mi-femme, mi-poésie,
Arrivait à Paris,
Elle avait commandé une voiture,
Le chauffeur l’attendait sur le quai
C’était un joli soir pour jouer ses vingt ans,
Quand il se mit soudain à pleuvoir. »
« (En cas de besoin, tournez toujours votre visage vers une fenêtre : elles sont les sorties de secours de l’âme que le génie humain a eu la sagesse inconsciente de poser dans toutes ses constructions.) »
« Il avait une tête à écrire des poèmes sur la lune.
Elle avait la candeur d’une petite fille qui rêve,
plus tard, d’exercer la profession d’arroseuse de planète. »
« Cet événement dont ne voulait pas parler Eugénie dans le vrai monde, nous y reviendrons plus tard. Eventuellement. Cela ne dépend pas de moi. Laissons-lui du temps. Tu n’es obligée de rien, Eugénie ! Ta vie de papier compte pas moins qu’une autre, tu as tout autant droit au respect et au mystère que n’importe qui, tu décides, et on te suit. »
« D’aussi loin qu’elle se souvienne, Eugénie s’était demandé pourquoi, alors que la majorité des femmes avaient des ailes, un petit nombre en étaient dépourvues. »
« La famille, les amis, les hommes, tout vous apprend à détester votre corps quand vous êtes gros. On fuit les vitrines, les reflets. Mais mes mains, elles je n’ai pas le choix. C’est la seule partie du corps que je ne peux éviter. Et, chaque fois, cette prise de conscience comme une gifle. Ce que les gens voient en moi, c’est ça. »
« la vérité, c’est qu’on apprend très vite aux filles à douter d’elles-mêmes et de leur physique. »
« Les rues sont des cages pour femmes inventées par les hommes et elles apprennent à y vivre en oiseaux ! »