Une saison douce / Milena Agus

Une de mes autrices chouchous ! Livre après livre elle construit une œuvre très intéressante. J’aime son humour et les portraits qu’elle fait, notamment ceux des femmes sardes. Elle a un talent de conteuse.

Un petit village perdu en Sardaigne voit débarquer un groupe de migrants accompagné d’humanitaires. On les installe dans une maison en ruine. On les observe. On les regarde de travers. Très vite il va y avoir deux camps, les villageois qui les côtoient et les aident, et les villageois qui ne veulent pas d’eux. Sorte de huis-clos où tous les deux camps mais aussi les migrants et les humanitaires s’observent et trouvent la situation de l’autre absurde.

Milena Agus ne donne pas de détails sur leur vie d’avant, on sait juste qu’ils veulent aller en Europe et que pour eux la Sardaigne ne ressemble pas à l’Europe.

Un groupe de femmes du village prend « les envahisseurs » en affection. Tous les jours elles viennent les voir, leur apportent des objets et les aident pour rénover la maison, commencer un jardin. Un quotidien, des habitudes se mettent en place. Ce sont elles qui nous raconte l’arrivée des « envahisseurs » et les réactions des uns et des autres. Ils essayent de fêter Noël ensemble alors qu’ils n’ont pas la même religion, culture. Les jeunes ayant désertés le village, les sardes se sentent seuls. Que se passera-t-il le jour où les migrants repartiront ?

Un roman truculent !

Si vous ne connaissez pas ses romans, je vous conseille de commencer par un autre que celui-ci. Lisez d’abord « Mal de pierre ».

Incipit :

« Les jours d’avant, debout devant nos armoires, nous avions interverti nos garde-robes, celle d’été au-dessus, celle d’hiver en dessous. Cette tâche accomplie, nous éprouvâmes la satisfaction de voir chaque chose à sa place, alors que bientôt, plus rien ne le serait. Les envahisseurs débarquèrent et nous prirent par surprise.

Si nous avions été prévenues, le rangement de nos armoires aurait été le dernier de nos soucis. »

Choix d’extraits :

« Le train ne s’arrêtait plus chez nous, il passait en sifflant et en nous ignorant, parce que nous n’étions même plus une commune, rien qu’un hameau baignant dans le silence : le Maire, les urgences médicales et le curé se trouvaient au village voisin. »

« Mais certains des envahisseurs aussi, une fois qu’ils eurent compris que c’était bien dans ce village sarde oublié de Dieu et des hommes, ravitaillé par les corbeaux, qu’on les avait envoyés, ne voulurent plus rien avoir à faire avec nous, déçus d’avoir risqué leur peau pour échouer ici. Non, leur place n’était pas ici. »

« Nos maris nous écoutaient, en laissant échapper quelques ricanements, mais il se sentaient trompés et trahis, puisqu’au début, nous pensions comme eux qu’il fallait renvoyer ces personnes et que nous les avions soutenus, alors qu’à présent notre conviction vacillait. Le mot d’ordre « tous unis » tenait toujours, mais maintenant, pour nous les femmes, il incluait aussi les envahisseurs, nous disaient nos maris, dépités. »

« Outre cultiver le potager, nous échanger des recettes et supputer les chances de l’idylle entre l’Ingénieur et Lina, ou la possibilité que l’humanitaire du sex-shop et Abdulrahman soient gays, une autre de nos activités favorites était de rêver. »

Note : 4.5 sur 5.

3 commentaires sur « Une saison douce / Milena Agus »

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