Le roman s’ouvre sur l’arrivée de la mère d’Evie sur Winter Island, une île sur la côte californienne. Evie va se marier et elle attend avec angoisse le retour de son futur mari, Liam, parti sur un bateau de pêche. L’atmosphère est tendue entre Evie et sa mère, cela fait 3 ans qu’elles ne se sont pas vues. En plus, une baleine s’est échouée et l’odeur devient insupportable.
Evangelista (de son prénom complet) a grandi sur cette île avec son père. Sa mère les a très vite abandonnés. Elle avait la bougeotte et ne supportait pas les odeurs de Winter Island.
Son père est tout pour elle. Il lui dit tout le temps qu’il l’aime et qu’il ne lui laissera rien lui arriver. Mais il n’est pas le père modèle. Il est toxicomane, alcoolique, beau-parleur, menteur.
« Papa m’élevait comme un garçon, essentiellement sans mère et avec tout un tas de macaronis au fromage dans des boîtes en carton pour le dîner. […] Nous vivions d’impostures : l’argent de la célébrité, l’argent de la drogue, et c’était tout juste assez pour ne jamais quitter l’île. »
Les touristes défilent sur l’île pour la célèbre herbe « Winter Island » cultivée et vendue par son père, qui leur sert de guide également. « Il était doué pour raconter l’histoire de ces terres de forêts sauvages envahies de brouillard, de trolls et de gnomes. »
Elle passe son adolescence avec une unique amie. « Rook était tout le contraire de moi : blonde, de grands yeux bleus et un père riche. » C’est une rebelle qui va pousser Evie à faire les 400 coups avec elle. Evie dit à propos d’elle-même : « J’avais été une enfant rugueuse, silencieuse, solitaire, mesurée et curieuse. »
Sa mère réapparaît de temps de temps et disparaît tout aussi vite. Ne leur laissant pas le temps de créer une relation mère-fille, ni de répondre aux nombreuses questions d’Evie qu’elle cherche en vain dans les livres, notamment sur l’amour. Comment se construire avec des parents dysfonctionnels ? Comment savoir aimer, s’aimer et être aimée ?
Avec Liam, c’est le bonheur, mais ils ont du mal à exprimer leur amour et Evie a besoin d’être rassurée en permanence. Elle a peur de perdre Liam.
Les chapitres courts se succèdent sous forme de pièces de puzzle pour reconstituer la vie d’Evie. Ils sont entrecoupés de réflexions et d’informations sur différentes espèces de baleines, qui font un parallèle avec la vie des personnages. Le sommaire indique les différentes entrées dans le roman, les thèmes liés à la vie insulaire : tsunami, brouillard, pluie, chaleur, neige, tremblement de terre, grêle, vent, gel, tonnerre, feu de forêt, brise.
J’ai beaucoup aimé l’écriture de l’américaine Crissy Van Meter dont c’est le premier roman. J’ai noté de magnifiques phrases comme celle-ci :
« J’ai passé ma vie entière à espérer que l’amour véritable puisse nicher sous les ailes bleues d’une mère. Passé chaque heure éveillée à chercher des réponses dans les modes de vie de créatures marines non douées de parole. »
L’écriture est poétique, chargée d’émotions. Un beau roman captivant sur l’amour, le pardon, la vie insulaire et l’enfance difficile, que je vous recommande vivement. Les dernières pièces du puzzle sont surprenantes. Et cette couverture est juste sublime, ce sont des illustrations du biologiste Ernst Haeckel (1824-1919).
Merci Babelio et La Croisée pour cette magnifique lecture.