Le diplôme / Amaury Barthet

Guillaume se fait quitter par sa compagne de 10 ans de vie commune. Il décide de se reprendre en main et s’inscrit dans une salle de gym où il rencontre Nadia, superbe jeune femme. D’abord méfiante, elle garde ses distances et malgré ses réticences par rapport à la gente masculine, finit par accepter de boire un verre avec lui. L’alcool aidant elle va peu à peu lui dévoiler ses blessures. Vendeuse chez Zara, elle espérait une autre vie en venant faire ses études à Paris. Y a-t-il un déterminisme social ?

Guillaume imagine un stratagème pour qu’elle intègre le job de ses rêves. Il scanne le diplôme d’HEC de son frère Henri et le modifie pour le mettre au nom de Nadia. Henri sera la porte d’entrée pour contacter un cadre de l’entreprise et avoir un entretien d’embauche. Guillaume n’est pas très famille et se sert sans scrupules de son frère et de ses relations.

L’histoire est racontée du point de vue de Guillaume. Il est professeur d’histoire-géographie dans un établissement de la banlieue parisienne. Plutôt désabusé, son métier ne le passionne pas. Mais il s’avère très doué pour mentir, dissimuler et coacher Nadia qui se considère comme une transfuge de classe. Le diplôme d’HEC s’avère être un véritable sésame.

Mais comme dit si bien la 4ème de couverture : « Pour réparer l’injustice, a-t-on le droit à l’imposture ? » L’argent fait-il le bonheur et peut-il tout acheter ? Et la méritocratie dans tout cela ? Vous avez 3h ! [rire]

Il fait écho à un autre roman que j’ai lu récemment « Le rires des autres » d’Emma Tholozan où là aussi il était question des études universitaires qui ne peuvent être poursuivies faute de bourses et qui ne mènent nulle part sinon vers une désillusion. Au bout il y a souvent le chômage et des petits boulots mal payés.

Amaury Barthet se moque des grandes écoles qui n’apprennent rien et permettent l’entre-soi. C’est drôle et l’air de rien, ce premier roman pose beaucoup de questions. On ne sait pas trop jusqu’où va nous mener cette histoire pleine de rebondissements.

Merci aux 68 premières fois pour la découverte de ce primo-romancier !

Note : 4 sur 5.

Incipit :
« Au fond, j’avais hâte d’être à la retraite. Je me voyais déjà passer mes vieux jours sur une plage paradisiaque en Thaïlande, occupant l’infinité de mon temps libre à boire des mojitos, à me faire masser, et à nager au milieu des raies mantas. Cette nouvelle vie, tout entière consacrée à l’oisiveté et aux plaisirs simples, me délivrerait enfin de mon asservissement à l’Éducation nationale.
Je songeais à ces jours meilleurs en corrigeant les copies de ma classe de terminale. Non, Victor Hugo n’était pas « né à l’âge de deux ans » ; non, la Corée du Nord n’était pas dirigée par le terrible dictateur « King Kong Un » ; et oui, le niveau de culture générale de mes élèves me donnait des envies de démission sans préavis. Professeur depuis huit ans dans un lycée de Bobigny, j’avais depuis longtemps abandonné tout espoir de transmission du savoir. »

« Ses perspectives d’avenir étaient peu enthousiasmantes, pourtant elle les acceptait car elle n’avait pas le choix. Son diplôme – ce document qui certifie moins les compétences que le milieu social d’origine – agissait comme un plafond de verre sur ses ambitions professionnelles. Pour elle, l’histoire était déjà écrite, elle enchaînerait les jobs abrutissants pendant 172 trimestres pour finalement toucher une retraite équivalente au Smic de la Roumanie. Mes collègues syndiqués y voyaient certainement un capitalisme inhumain, mon frère une inévitable sélection naturelle, et moi-même, je ne savais plus très bien ce qu’il fallait en penser. »

« Je refermai l’ouvrage. Que fallait-il en conclure ? Tout simplement que pour Nadia et moi, il n’y avait rien à espérer. Toute notre vie, nous serions estampillés comme des étudiants de fac, et toute la sienne, Henri serait reconnu comme un brillant HEC. Le diplôme nous avait marqués au fer rouge. »

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