L’autrice a écrit ce premier roman dans le cadre d’une master class littéraire. Elle voulait écrire sur le travail, le geste du travail avec son jargon. Elle nous emmène dans les coulisses d’une chaîne de fast food. Elle décrit les différents postes, tout est chronométré et surveillé. Elle est d’abord en salle, là où personne ne veut travailler, alors on y met les nouveaux. Puis aux frites, et enfin au pass drive, le graal. La « mana » ou « manageuse en salle », Chouchou, l’a toujours à l’œil. Elle doit assurer si elle veut espérer être sur le poste convoité.
En parallèle, elle alterne avec des fragments d’enfance du personnage principal, Claire, notamment la scène d’ouverture, au retour des vacances lorsque son père s’arrête au Mc Do pour contenter son petit frère, Nico. Quelques années plus tard, c’est elle qui y travaille et la réalité ne correspond pas à ses souvenirs. Véritable radiographie d’une époque, elle nous y plonge avec des odeurs et des sensations.
Autre figure importante du livre, le père. Il est ouvrier. Son travail à l’usine l’use, le fatigue. Elle parle alors d’aliénation du travail. Elle observe le monde du travail. Elle écrit en creux, sans pathos, ni colère, ni critique. Et pourtant, à la lecture de ce texte, on ne peut qu’être révolté par ces conditions et ces cadences qui mènent inévitablement à l’accident, ou à la faute selon le point de vue. Simple et efficace, l’écriture de Claire Baglin nous met devant le fait accompli. Édifiant.
Avec cette lecture, je termine mon second tour du challenge de l’été VLEEL !
Incipit :
« – Et pourquoi ici plutôt qu’ailleurs ? Je suppose que vous avez postulé partout, même chez nos concurrents. »
« Après trois semaines au drive, je suis désormais en salle, le royaume dont personne ne veut, constitué du lobby intérieur où mangent les clients, de la terrasse, des toilettes et du local à poubelle. Je suis en salle parce que je viens d’arriver et que les nouveaux servent à être là où personne ne veut travailler. Je comprends que je vais rester à ce poste. Lorsque je sers un des plateaux posés sur le comptoir, je sais que les équipières de l’autre côté se sont battues pour être derrière le rectangle en béton du comptoir, planquées. »

Ce fut pour moi une découverte, non seulement au niveau du style mais aussi sur le sujet, la condition précaire des emplois d’ aujourd’hui est décrit ici avec tellement de vérité, que j’en suis restée complètement étonnée…
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C’est un livre auquel je pense encore après ma lecture. L’air de rien, il amène à la réflexion.
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