Albane est une femme parfaite, du moins vu de l’extérieur. Elle maîtrise tout et ne supporte pas le moindre grain de sable dans son emploi du temps. Sa précision et son efficacité sont appréciées à l’hôpital où elle travaille en tant qu’infirmière. A la maison, c’est une autre histoire… Elle impose des règles et exige leur respect à ses enfants : Emma, 6 ans, et Arthur, 4 ans. Albane est dure avec sa fille. Elle n’a pas de geste tendre envers elle. Alors que pour son fils, elle n’est qu’amour. Pourquoi une telle différence de traitement entre ses deux enfants ? C’est ce que le lecteur apprendra au fur et à mesure de sa lecture.
Le jour où Albane « dérape », son mari exige qu’elle aille voir un psy. Elle y va à reculons, échafaudant des récits pour éviter de parler d’elle, de son enfance. Le psychiatre lui propose des séances d’hypnose qu’elle finit par accepter et qui vont bouleverser toute sa vie en mettant au jour des événements tragiques de son enfance qu’elle avait occultés de sa mémoire. Comment continuer à vivre une vie « normale » après la révélation de ce traumatisme ? Toutes ses stratégies et ses TOC mis en place ne fonctionnent plus. Elle aurait préféré vivre dans le déni plutôt que d’en avoir conscience.
Il s’agit d’un roman éprouvant pour le lecteur car on vit les tourments psychologiques d’Albane et on la voit sombrer. Au début on ne comprend pas cette femme, on peut même la détester. Puis petit à petit notre regard change. Un premier roman bouleversant, au suspense qui vous happe jusqu’à vous tirer des larmes. Je suivrai avec intérêt le second roman de cette nouvelle autrice.
Incipit :
« Ce n’est qu’en passant à l’heure d’été que l’on est au printemps. Alors, on se remet à espérer.
Deux fois l’an, depuis l’enfance, il a la croyance tenacement naïve de maîtriser le temps, de posséder le pouvoir de changer de saison comme on change de décor, en faisant tourner les aiguilles de sa montre. Hier encore, Sebastian aurait pris le métro, aujourd’hui, il préfère marcher. »
« C’est un fait, oui, Albane aime l’ordre, ou, plutôt, elle abomine l’imprévu et les surprises. Il en va de son équilibre mental qu’elle sache tout à l’avance. La journée s’est bien passée si elle a pu quitter l’hôpital à 14h11, si Emma et Arthur ont mangé entre 19 heures et 19h20, et s’ils sont couchés avant 20 heures. Un rien, un retard, un défaut dans le planning minuté qu’elle s’impose et qu’elle impose aux autres peuvent la faire déborder, comme ces verres que les enfants s’amusent à remplir jusqu’à ras bord, une goutte de trop et elle bascule. Elle est comme ça depuis toute petite. »
Un avis sur « Celle qui criait au loup / Delphine Saada »