Un coup au cœur / Emmanuelle de Boysson

L’autrice raconte dans un roman son attaque cardiaque et sa longue convalescence. Pour cela, il a d’abord fallu qu’elle mène une enquête. Elle ne se souvient pas de ce moment où son compagnon lui fait un massage cardiaque, de l’arrivée des pompiers pour la réanimer, de son transport à l’hôpital et des soins médicaux pratiqués en urgence. Avec beaucoup de détails, parfois du sang, elle fait le récit de ce combat pour la vie. Une grande partie du roman se déroule à l’hôpital et traduit une reconnaissance envers le personnel médical.

Emma se reconstruit petit à petit. Elle réapprend les gestes du quotidien afin de retrouver son autonomie. Il n’est plus question de fumer désormais mais de prendre soin de son corps, d’elle.

Elle aborde également le thème de l’EMI ou expérience de mort imminente. Pendant les trente minutes où son cœur a cessé de battre, elle s’est retrouvée dans un endroit où elle se sentait bien et dont elle n’avait pas envie de revenir. Troublée, elle a d’abord eu peur d’en parler, puis elle a lu un livre sur le sujet et commencé à écrire ses souvenirs de ce moment.

Ce livre est tout sauf triste. Il est lumineux. Avec humour et autodérision, mais aussi avec poésie et douceur, Emmanuelle de Boysson nous offre un hymne à la vie.

Je remercie l’autrice et Calmann-Lévy pour l’envoi de ce livre

Note : 4 sur 5.

Incipit :
« Je suis morte le 7 février 2022. Il était 17h20 lorsque mon cœur s’est arrêté. Je ne me suis aperçue de rien. Ça s’est passé comme si je m’endormais. C’était doux, presque un soulagement. Je savais où j’allais : il m’a suffi d’ouvrir une porte pour entrer dans un endroit que j’avais l’impression de connaître, où je me sentais bien. Trente minutes dans l’au-delà. Si Anton n’avait pas été là, j’y serais encore. S’il n’avait pas eu la présence d’esprit de me faire un massage cardiaque, j’aurais pu devenir un légume. Il m’a sauvée, repêchée in extremis, ou plutôt ressuscitée. Un vrai miracle. »

« Maintenant que je suis redevenue lucide, je ne risque plus de divaguer, je peux me fier à ma petite jugeotte. De même, je comprends mieux le voyage : la traversée du Styx a été un jeu d’enfant, un pur plaisir. Le retour, un calvaire qui se prolonge. Pas étonnant que la plupart des gens préfèrent un aller simple. »

« Ma cousine me caresse la joue, un pigeon se pose sur un banc, le ciel rosit. Je suis vivante. »

« Sans doute ai-je négligé, voire maltraité mon corps. Il m’a fait payer cher mon addiction au tabac. Le corps, cet inconnu. Alors que nous nous croyons tout-puissants, il accumule rancœurs et frustrations pour finir par se venger. S’il nous offre d’infinis plaisirs, il n’a aucune morale, nous trahit, nous ronge et nous détruit. Pas d’état d’âme : même les génies sont foudroyés. La nature peut se permettre de gaspiller, elle renaît à foison, là où on ne l’attend pas. »

« Si je n’écris pas, ce que j’ai vécu n’existe pas. »

« Peu à peu, je renoue avec ce délié, ce lâcher, cette magie d’une pensée en action. Les phrases coulent et s’entrelacent, suivant une géographie intérieure faite d’impressions. Un pur plaisir, une renaissance, un instant à moi, la satisfaction, que jamais l’ordinateur ne donnera, d’épouser des arabesques, de vagabonder, de jouer aux devinettes, de file la métaphore à n’en plus finir. Sans complexes, je me vautre dans le moelleux des figures et des tournures. Si j’en avais la force, cela pourrait durer des heures, tant l’écriture rend la vie, me redonne ce qui fait de moi quelqu’un d’unique, m’unifie, me pose et me repose, me relie aux scribes, aux bâtisseurs de cathédrales, aux potiers, aux moissonneuses, tisseuses et brodeuses. »

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